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Les nouveaux points noirs
Les nouveaux points noirs, les nouveaux dangers et pas seulement sur la route mais aussi dans les voitures et dans la tête des conducteurs !
Soyons clair : un point noir au sens des années 80, lorsque l'on a commencé à les traiter, est un endroit ponctuel où l'on a constaté plusieurs accidents mortels pendant les 5 années précédentes, par exemple 5 tués. C'est à cette signification que je me rattache lorsque je dis que les points noirs ont été éradiqués. Actuellement il est d'usage de qualifier de point noir un endroit dangereux, même s'il n'y a eu qu'un accident mortel ou si par similitude de configuration une prédictibilité d'accident existe. C'est à cette signification que je me reporte lorsque je parle des "nouveaux" points noirs, que j'étends égalements aux "dangers" ne dépendant pas de l'infrastucture mais du comportement des conducteurs ou des véhicules.
Il y a 20 à 30 ans, pratiquement la majeure partie des points noirs de l'époque ont été traités, éradiqués. Du fait de ces suppressions, conjuguées avec d'autres mesures générales, la sécurité s'est améliorée. Mais depuis, des nouveaux points noirs sont apparus et pas seulement sur la route ... des nouveaux dangers ! Pendant que des efforts ont été faits et seront faits d'un côté pour améliorer la sécurité, des manques de bon sens et de logique, des carences de décisions, "désaméliorent" la sécurité d'un autre côté, nous faisant s'éloigner l'espoir de tangenter un jour l'asymptote zéro.
Ces nouveaux points noirs ET ces nouveaux dangers, sont entre autres :
-- nouveaux grands carrefours avec tourne à gauche central que l'on ncontinue à réaliser ça et là, malgré leur dangerosité au lieu de faire des giratoires
- fossés profonds et proches avec leurs têtes de buses meurtrières (dangers disséminés)
-- élargissements inconsidérés de la chaussée rapprochant les fossés et les arbres (zones longues)
-- arbres que l'on continue à planter trop proches de la chaussée (dangers disséminés)
-- dénivellations latérales de tapis d'enrobés, temporaires ou définitives
-- masques à la visibilité du piéton en bord de trottoir : bacs à fleurs, végétation, barrières
-- lunettes à larges branches formant œillères empêchant la visibilité latérale
-- montants trop larges des parebrises cachent les piétons
-- objets suspendus devant le pare-brise, de plus en plus gros et jamais verbalisés
-- écrans GPS obligeant à quitter la route des yeux
-- utilisation du téléphone - lecture et écriture de SMS
-- difficulté visuelle de réglage du limiteur
-- distractions visuelles engendrés par les indications visuelles superflues de l'ordinateur de bord
-- Pokemon Go
Petit retour en arrière : comment sont nés et sont morts les premiers points noirs.
Jusqu'à 1975, il y avait peu de points noirs identifiés comme tels car il y avait des accidents partout du fait que la vitesse était omniprésente et communément admise comme une vertu, un dynamisme, et l'alcool considéré comme une tradition française.
Puis entre 1975 et 1980, les points noirs sont apparus car suite à la fixation de vitesses maximales, le niveau de dangerosité générale a baissé et des endroits particuliers ont concentré une partie des accidents restants, ces endroits sont devenus plus visibles parce qu'il y subsistait une cause spécifique visible, moins dépendante de la vitesse : même les conducteurs prudents y étaient surpris, piégés.
En conséquence, entre 1980 et 1990, dans chaque département, les ingénieurs de l'équipement se sont donc penchés sur la trentaine de points noirs qui avaient ainsi émergé dans chaque département. Pour chaque type d'accident ils en ont observé et analysé méticuleusement les causes, en ont déduit des principes d'aménagement, entre autres pour les quelques cas suivants.
Les trois principaux types de points noirs qui ont été supprimés ces trois dernières décennies sont :
- Les grands carrefours avec voie de tourne à gauche centrale
- les virages trompeurs
- les sections glissantes
Abordons d'abord les carrefours à tourne à gauche central.
Pourquoi ce type de carrefour était (et est encore) dangereux ? Pour deux raisons
1 – il permet aux véhicules (voitures et motos) de la voie prioritaire de rouler vite : ce type de carrefour a été conçu à l'époque où les ingénieurs recherchaient à favoriser à outrance la vitesse ou tout au moins à éradiquer tout ce qui aurait la mauvaise tendance à faire ralentir les véhicules.
2 - ce type de carrefour demande d'autre part, pour ceux qui sont sur la voie secondaire, de traverser une très grande largeur de chaussée : 11 mètres, avec au milieu, une largeur neutralisée très ambigüe.
Mécanisme de l'accident. À ces carrefours, l'abus de priorité manifesté par les usagers de la voie prioritaire (A et D) et leur grande vitesse d'approche ne permet pas à l'usager démarrant au stop sur l'autre voie en B, de franchir le carrefour jusqu'en E avec une sécurité suffisante, même en respectant les prescriptions du code de la route qui sont : "marquer un temps d'arrêt, céder le passage aux véhicules circulant sur l'autre route et ne s'y engager qu'après s'être assuré qu'il peut le faire sans danger.
Or, après avoir vérifié que rien ne venait à gauche ni à droite, il faut "un strict minimum de six secondes à l'usager arrêté au stop, pour prendre son information, la traiter, prendre sa décision, effectuer sa manœuvre, et dégager la zone centrale du carrefour " (extrait du livre "Sécurité des routes et des rues" 5.4 a qui recommande de se baser sur 8 secondes). Pendant ces 8 secondes l'usager prioritaire venant de gauche (D) ou de droite (A) à 90 km/h a parcouru plus de 200 mètres et est passé d'une situation "non visible" à une potentialité de collision.
Pire : parfois, les conducteurs A interrogés après l'accident, disent qu'ils ont bien vu la voiture B démarrer mais qu'ils n'ont pas ralenti car ils ont pensé que la voiture B allait s'arrêter au milieu, en C. Or les voitures ne s'arrêtent jamais au milieu car le conducteur pense qu'il n'y a pas assez de place.
Comment a-t-on traité les carrefours pointsnoirs ? La solution radicale a été de les transformer en giratoire. A cette époque on construisait de trop grands giratoires, il fallait donc acquérir beaucoup de terrain. Actuellement on fait des giratoires moins grands qui s'inscrivent presque dans la surface des grands carrefours à tourne à gauche central. Une autre solution moins radicale a été d'y limiter la vitesse à 70 km/h, comme cela a été fait au carrefour de la Bernardière en Vendée (5 morts en 2002) mais ce n'est pas suffisant lorsqu'une raison de manque de visibilité existe
Autres points noirs supprimés il y a 30 ans : certains virages TROMPEURS.
Dans les virages-points-noirs des chevrons et des balises ont été implantés. Pour qu'un virage soit "point noir" il ne suffit pas qu'il soit "virage", car un virage, on le voit arriver donc on ralentit. Pour les virages situés après une longue ligne droite, on voit les balises et les chevrons, donc on ralentit. Par contre ce qu'on voyait moins bien et qui fait que le virage était "point noir", c'est lorsqu'il s'agissait d'un virage dont la ligne droite d'approche se prolongeait par une voie secondaire (photos) et donnait visuellement l'impression que la route continuait droit, ne laissant découvrir qu'au tout dernier moment que la route tournait et qu'il aurait fallu ralentir avant, c'était trompeur. S'il s'agissait d'un virage à gauche, la voiture allait dans le décor sans trop de mal sauf en présence d'un arbre, par contre, s'il s'agissait d'un virage à droite, c'était beaucoup plus grave car la voiture se déportait sur sa gauche et risquait de ce fait une collision frontale avec un véhicule venant dans l'autre sens. Pour traiter ce type de virage-point-noir, heureusement assez rares, la solution a été de placer, en plus des chevrons et des balises, deux panneaux A1 virages (un à droite l'autre répété à gauche), et si l'observation de l'ingénieur le requérait, une limitation de vitesse. Parenthèse : Malheureusement il y a eu des abus car sur plein d'autres virages ordinaires on a placé et on place encore (!), aussi des panneaux virages A1, on en rajoute tous les ans, même lorsqu'il n'y a pas de voie secondaire continuant tout droit, donc "non trompeurs", donc non points noirs, sans jamais en enlever, on constate une pléthore de panneaux virages là où des balises et des chevons sont suffisants et font très bien l'affaire. Dans certains départements on constate même une "épidémie" de limitations ponctuelle de vitesse aux virages. On n'est pas loin bientôt de mettre des panneaux virages même dans les lignes droites sous prétexte qu'elles ne sont pas "tout à fait droite".
Troisième type de points noirs supprimés il y a 30 ans : certaines sections glissantes
D'autres points noirs concernaient une section où la chaussée était devenue glissante du fait que les granulats utilisés étaient soit "semi-concassés" donc possédant un côté arrondi, soit tendres (calcaire) donc perdant leur rugosité après quelques mois de circulation. Ces points noirs glissants ont été progressivement réglés entre 1980 et 1995 par un meilleur choix des granulats, plus anguleux, moins tendres, moins soumis à l'attrition.
Résultat de la suppression de ces points noirs : une baisse constatée des accidents.
Les dispositions qui ont été prises pour traiter les points noirs identifiés (nombre d'accidents) ont été étendus aux mêmes configurations, sans accidents constatés, mais prédictibles d'accidents. Parallèlement, dans les villes, des opérations d'aménagements de modération de vitesse suite à l'élan donné en 1985 par Bernard DURAND adjoint à la DSCR. Ces actions conjuguées ont réussi à maintenir pendant de nombreuses années un plafond annuel d'accidents aux alentours de 8 000 à 10 000 tués jusqu'en 2002, date à partir de laquelle une très forte baisse du nombre d'accidents a été enregistrée due à un meilleur respect des vitesses maximales autorisées, suite à l'implantation de radars automatiques.
Mais actuellement, de nouveaux points noirs, de nouveaux dangers fleurissent sur la route mais aussi ailleurs que sur la route : dans les voitures et dans la tête des conducteurs.
Nouveaux points noirs : d'abord les nouveaux carrefours à tourne à gauche central.
D'une part on a recommencé ou continué à construire de nouveaux meurtriers carrefours à tourne à gauche central dont la surface de bitume et le coût sont pourtant aussi importants voire plus que pour un giratoire de taille moyenne (par le passé, on en a souvent construit de beaucoup trop grands)
Autres nouveaux dangers : les nouveaux arbres.
On a continué à planter des arbres très proches de la route. L'éloignement recommandé est 7m pour les nouveaux arbres : c'est la "zone de sécurité", mais si déjà si l'on évitait d'en planter à moins de 4 m, on éviterait le pire.
Autres nouveaux dangers : les fossés.
Beaucoup de fossés sont déraisonnablement profonds et abrupts :
250 tués annuellement sur fossés, têtes de buse, talus, paroi rocheuses
Parenthèse : deux questions au sujet des fossés :
-- des fossés sont-ils vraiment toujours nécessaires ? Non, dans de très nombreux cas comme par exemple les photos suivantes, ils ne sont pas nécessaires : la route est au niveau des champs.
-- ont-ils besoin d'être si profonds, si abrupts, pour recueillir l'eau ? Non
Pourquoi y a-t-il tant de fossés partout en France et incomparablement beaucoup moins ailleurs ?
Historique.
Dès les années 1550 les textes font apparaitre que les gestionnaires des voies sont confrontés aux usurpations continuelles des emprises routières par les riverains. Des solutions sont adoptées, pas toujours avec succès : planter des arbres en limite (ordonnance du 20 mai 1579) mais ils sont parfois coupés. Plus tard on trouve la solution des fossés : ordonnance du 20 mai 1705 : Ordonne Sa Majesté, qu'il sera fait des fossés à l'extrémité des chemins de terre qui bordent les pavés, (...) pour conserver la largeur des chemins et les héritages riverains. De nouveau, l'arrêt du Conseil d'État du 17 juin 1721 concernant les alignements : fait, Sa Majesté, défense à tous particuliers, même à tous seigneurs, (...) de combler les fossés et de labourer en dedans de la largeur bornée par lesdits fossés, d'y mettre aucuns fumier, décombres et autres immondices, ...
L'"Arrêt Turgot" du 6 février 1776 fixant la largeur des routes, est plus explicite et laisse penser que le problème de l'usurpation des emprises est devenu moins aigu :
On note qu'il y a deux raisons possibles pour construire des fossés (empiètement des riverains et écoulement des eaux) mais que déjà il est spécifié "dans les cas seulement où lesdits fossés auront été jugés nécessaires.
Puis on n'en a plus parlé mais nous autres ingénieurs avons continué, en France, à en faire partout sans réfléchir de savoir s'ils étaient nécessaires et sans se rendre compte que la première raison majeure qui avait procéder à leur creusement (empiètement par les riverains) avait disparue ou n'était plus tellement nécessaire du fait du cadastre et des possibilités de bornage.
On fait des fossés partout sans étudier s'il est utile à tel ou tel endroit, parce que les dessins de profil en travers types figurent des fossés, puis que les dessinateurs dessinent le fossé, on en fait "parce qu'on a toujours fait comme ça", parce que le conducteur de la pelle mécanique commence à un bout et avance en creusant jusqu'à l'autre bout, et plus c'est profond, plus on est satisfait et 100 usagers ou plus s'y tuent tous les ans.
Il existe des recommandations techniques officielles qui disent que les fossés trop proches, trop profond, trop abrupts, sont à éviter, voir les guides du SETRA : Guide technique "Traitement des obstacles latéraux" du SETRA et les recommandations pour l'Aménagement des Routes Principales (ARP) mais les lit-on ?
Que dit l'ARP ? En 2.2 c : Dans la zone de sécurité (7m pour les aménagements neufs et 4 m pour les routes existantes), il est primordial d'exclure tout obstacle agressif (plantation, support EDF ou autres concessionnaires, têtes de buse et ponceaux) et d'éviter les fossés profonds. En 2.2 g : Les fossés de profondeur modérée (inférieure à 50 cm) sont acceptables.
Que dit le Guide "Traitement des obstacles latéraux" ? : Le fossé présente deux dangers : par sa géométrie (profondeur et pente de ses parois) en favorisant un retournement du véhicule, parfois son blocage brutal, ou son effet de guidage vers un obstacle situé dans le fossé (tête d'aqueduc, poteau)
Extrait du guide du SETRA : (voir croquis ci-contre) fossé qualifié de "modérément agressif", acceptable
sauf dans la "zone de récupération" (les premiers 1,75 m).
Le fossé est qualifié de "sûr" si la profondeur est de moins de 20 cm et la pente de 25%
Dans les autres pays les fossés sont beaucoup plus rares qu'en France
Exemples ci-contre en Suisse où les fossés sont très rares ou très peu profonds
Autres nouveaux dangers : élargissements inconsidérés de chaussée au détriment des accotements et rapprochant les obstacles latéraux.
Pourtant les recommandations extraites du tableau de l’ARP (SETRA) sont claires :
Ne pas élargir la chaussée à plus de 6 m si l’on ne peut pas avoir une bande dérasée d’au moins 1,50m de chaque côté.
Pour ce sujet, comme pour d'autres, la délocalisation des compétences aux départements en 1982 aurait du être encadrée plus strictement : certaines recommandations devraient être des instructions.
Photo ci-contre : élargissement démesurément exagéré sur cette RD de moyenne importance : 2 dangers : la plus grande largeur incite à rouler plus vite qu'avant alors même qu'on augmente le risque présenté par le fossé proche, du fait qu'on a réduit l'accotement.
L'élargissement inconsidéré rapproche tous les obstacles qui sont présents aux abords : poteaux, arbres, etc.
Autres nouveaux dangers : les dénivellations entre tapis d'enrobé et l'accotement
Souvent, après la réalisation d’un nouveau tapis d’enrobé, une marche (de plus de 3 cm) subsiste quelques semaines ou toujours, cette marche est dangereuse et responsable d’accidents mortels pour les 2 roues motorisés ou non et pour les voitures : le conducteur dont la voiture qui a dévié vers l'accotement pour une raison quelconque et a engagé ses roues droites sur l’accotement, est contraint de donner un brutal coup de volant vers la gauche pour afin de franchir la marche et revenir sur la chaussée, ce qui lui fait traverser brutalement toute la chaussée et provoque un accident frontal avec les véhicules venant dans l’autre sens. C'est un accident mortel malheureusement classique et maintes fois constaté.
Le remblaiement du premier mètre qui jouxte la marche d'enrobé doit se faire dans les jours qui suivent l'application du tapis, dès que le marquage est terminé.
Autres nouveaux points noirs : en ville les masques latéraux à la visibilité des piétons : bacs à fleurs, végétations, barrières.
Tout cela, placé en bord de chaussée, souvent près des passages piétons, masquent les enfants qui s'approchent pour traverser : les enfants doivent être vus de la tête aux pieds
Les barrières qui masquent les piétons :
Ci-contre, en 2011, rue Curial à Paris un enfant de 5 ans a été tué par une voiture : il débouchait de la gauche, (flèche rouge) là où l'on voit le piéton en gris. On s'aperçoit clairement que la moitié basse du piéton adulte est masqué par la barrière à croisillon et grillagée, on comprend aisément que l'enfant de 5 ans deux fois plus petit que le piéton adulte, était donc complètement masqué : c'est une guillotine. Un barreaudage horizontal ne masquerait pas la visibilité.
Assurer la visibilité : les végétations et bacs à fleurs proches des chaussées qui masquent la visibilité des piétons
Ces végétations placées en bord de chaussée, souvent près des passages piétons, masquent les enfants qui s'approchent pour traverser : les enfants doivent être vus de la tête aux pieds
Autre nouveaux points noirs qui émergent en France (pas ailleurs ! ) : les objets suspendus devant le pare-brise.
Ces objets cachent la visibilité et les forces de police sont laxistes sur ce point et n'interviennent jamais !
Que dit le code de la route au sujet des objets suspendus ?
Tout conducteur doit se tenir constamment en état et en position d'exécuter commodément et sans délai toutes les manœuvres qui lui incombent. Ses possibilités de mouvement et son champ de vision ne doivent pas être réduits par le nombre ou la position des passagers, par les objets transportés ou par l'apposition d'objets non transparents sur les vitres.
Le fait, pour tout conducteur, de contrevenir aux dispositions du II ci-dessus est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la deuxième classe. En cas d'infraction aux dispositions ci-dessus, l'immobilisation du véhicule peut être prescrite.
Théoriquement le texte permet aux forces de l'ordre de verbaliser, mais si on veut vraiment pinailler, il suffit de rajouter dans le code les mots "ou suspendus" après le mot "transportés".
Autre nouveau point noir : le montant trop large des pare-brise plongeant.
Le parebrise plongeant réduit la gravité des blessures du piéton en cas de choc, mais un montant large, est nocives sur le plan visibilité : on risque plus de ne pas voir le piéton car le montant du pare-brise plongeant est loin des yeux du conducteur, donc rétrécit l'angle de visibilité. Pourquoi le montant est-il large et très masquant ? Parce qu'il cumule quatre fonctions :
- tenir le pare-brise
- rigidifier la coque de la voiture
- servir de support au rétroviseur
- être une partie de la portière
Un bon compromis existe, il est adopté par certains constructeurs (ex la Picasso) en limitant le montant plongeant à une seule fonction : celle de tenir le pare-brise, les trois autres fonctions étant reportées en arrière. De ce fait, le montant plongeant est toujours dans le champ de vision du conducteur, il protège le piéton en cas de choc, mais il est très mince et n'occulte pas beaucoup le champ de vision.
Un autre nouveau point noir : les lunettes à larges branches
C'est la mode depuis une dizaine d'années en France de fabriquer, de vendre et de porter des lunettes à larges branches. Ces lunettes sont dangereuses lors des déplacements dans l'espace public : les branches masque la vision périphérique et de ce fait les conducteurs ne voient pas ce qui est sur les côtés et les piétons ne voient pas les véhicules qui arrivent latéralement.
Petites leçons d'optique pour les opticiens qui ont oublié ce qu'ils ont appris à l'école
1ère leçon du niveau CE 2 :
Vous ne voyez pas ses yeux donc ses yeux ne vous voient pas --> photos -->
2ème leçon du niveau institut supérieur d'optique
La vision se compose de deux zones : le regard et le champ visuel
La zone du regard (en bleu sur le croquis) est une toute petite zone centrale où on voit très bien tous les détails. L'image correspondant à la zone du regard va au fond de l'œil vers une zone de la rétine appelée macula, composée de cônes. La fovéa est la zone centrale de la macula, c’est-à-dire celle qui donne la vision la plus précise.
Tout autour de la petite zone du regard, il y a le champ visuel (en jaune sur le croquis), l’œil ne voit pas les détails mais voit un peu les formes, les couleurs, les mouvements, c’est très pratique : dans le champ visuel on verra qu’il y a un véhicule ou un piéton qui arrive sur un coté, même sans tourner les yeux, mais avec les lunettes à branches larges, on ne le verra pas arriver : c'est là le danger de ces nouvelles lunettes
Ce type de lunette est particulièrement porté et vendu en France. Dans aucun des pays où je me suis rendu je n'ai trouvé pratiquement personne qui porte ou qui vend ces lunettes à larges branches (entre autres Chine, Californie, Suède, Suisse, Indonésie, Russie)
Dans le site de l'ASNAV (Association nationale pour l'amélioration de la vue), une partie est consacrée à "la vision et la conduite", on y relève l'explication sur la vision latérale : La vision latérale et le champ visuel permettent de regarder devant soi tout en surveillant ce qui se passe à côté.
J'ai donc écrit à M. Bertrand ROY - Président de l'ASNAV (Association nationale pour l'amélioration de la vue) - (en juillet 2010) pour lui signaler que ce serait bien qu'il agisse pour que les lunettiers ne fabriquent plus de lunettes à larges branches.
C'était en Juillet 2010 : aucune réponse à ce jour, mais surtout, des lunettes à larges branches continuent de plus en plus d'être fabriquées et proposées à la vente en France
J'ai écrit également sans avoir de réponses à :
M. le Président Fédération Nationale des Opticiens Indépendants, M. le Président du Syndicat national des ophtalmologistes, M. le Président de l'Union des opticiens, Mme la Présidente de la Société Française des ophtalmologistes. Aucune réponse à ce jour, plusieurs années après.
Autres nouveaux points noirs et derniers de cette présentation : les distracteurs (le téléphone, les SMS, le GPS, les DVD, les lectures d'e.mail)
Lors des dernières modifications de l'article R. 412-6 du code de la route on a vraiment loupé l'occasion d'aller jusqu'au bout de la logique et de la sécurité :
-- en interdisant seulement l'usage du téléphone tenu en main, donc en autorisant le téléphone main libre
-- et en interdisant, dans le champ de vision du conducteur, les écrans ne "constituant pas une aide à la conduite" donc en autorisant ceux qui constituent une aide à la conduite.
Extraits du code de la route
Article R. 412-6-1
L'usage d'un téléphone tenu en main par le conducteur d'un véhicule en circulation est interdit.
Article R. 412-6-2
Le fait de placer dans le champ de vision du conducteur d'un véhicule en circulation un appareil en fonctionnement doté d'un écran et ne constituant pas une aide à la conduite ou à la navigation est interdit.
Pour le téléphone, la raison probable pour laquelle on n'a pas interdit le téléphone main libre est parce que les forces de l'ordre ne peuvent pas voir facilement si le conducteur téléphone en main libre, donc qu'ils ne peuvent pas verbaliser. On n'était absolument pas obligé d'être binaire à ce point : on pouvait très bien l'interdire : le conducteur, lui au moins, saurait que c'est interdit : ce serait au moins pédagogique. D'autre part, en cas d'accident, il sera de toute façon possible de savoir si le conducteur téléphonait en main libre, donc là, la constatation serait réalisable et l'interdiction pertinente : pour l'accident du car (sans passagers) au sud de Lyon il avait été possible de déterminer que le conducteur avait utilisé deux téléphones successivement pendant de longs moments.
Il est reconnu que le danger du téléphone en voiture n'est pas seulement le fait de mobiliser la main qui tient le téléphone mais aussi et surtout de mobiliser l'attention mentale du conducteur : une étude INRETS a montré que le fait d'écouter la radio en conduisant réduit l'attention de seulement 4%, mais que le fait de téléphoner la réduit de 28% à 44% selon le sujet évoqué. D'autres constatations : le temps de réaction est doublé et le conducteur a tendance à ne plus regarder dans ses rétroviseurs.
Pour le GPS la raison de la tolérance de l'écran du GPS est une acceptation béate devant un progrès technologique. Le danger de quitter la route des yeux plusieurs secondes pour regarder l'écran et décrypter ses indications graphiques est indéniable. Or, son utilisation en conduite n'a nullement besoin d'être visuelle : il est très suffisant d'entendre les consignes orales du GPS tout au long de l'itinéraire et rien ne serait perdu si l'écran ne s'allumait pas lorsque le moteur tourne ou lorsque la voiture roule. Est-il acceptable d'admettre que la facilité de trouver sa route puisse amoindrir la sécurité ?
L'accident exceptionnellement grave et dramatique de Sierre en Suisse le 13 mars 2012 (28 morts), a montré que les distracteurs d'attention mentale et de vision de la route pouvaient être meurtriers.
Conclusion
Le graphe ci-contre des accidents mortels fait apparaitre les 4 lignes horizontales sur lesquelles a tangenté le nombre des tués après qu'une action sécuritaire ait opéré son effet : lignes 12 000, 10 000, 8 000 et 4 000. Par exemple les premières actions concernant la vitesse qui ont été mises en place entre 1970 et 1980 ont vu leurs effets stagner en tendant vers 12 000 tués vers 1980-82. Puis les mesures prises contre l'alcool et les 2èmes mesures prises contre la vitesse ont fait leur effet puis le nombre de tués s'est bloqué quelques années sur un pallier ase rapprochant de 10 000. Puis vers 1990 le permis à points et le 50 en ville ont permis un nouveau décrochement qui a abouti à une asymptote à 8 000. La dernière action a été les radars conjugués avec les contrôles automatisés, cette action a fait plonger la courbe des tués, mais cette courbe tangente les 3 500 (en + ou en -) depuis environ 4 ans.
Va-t-on rester à 3 500, va-t-on remonter, ou va-t-on opérer une nouvelle diminution ? Cela va dépendre de 3 séries de facteurs : gains possibles, pertes possibles en infrastructure, et pertes possibles en comportement et véhicules le graphe ci-après montre ces trois facteurs.
1 Dangers présents actuellement. On peut viser (viser) un gain de 3 500, donc l'asymptote Zéro, si nous agissons sur les dangers présents actuellement (voir graphe ci-contre) :
-- collisions frontales : en réalisant des routes à 2 fois 1 voie avec glissières séparatrices médianes et passant de 90 km/h à 80 km/h la vitesse limite sur les voies bidirectionnelles (en conservant ou non à 90, dans une première phase, les 60 000 km RGC).
-- grands carrefours à tourne à gauche central : en continuant à les transformer en giratoires et en y limitant la vitesse à 70 pour ceux qu'on ne transforme pas.
-- arbres : en continuant à abattre les arbres trop proche sans valeur avec ou non replantation à distance éloignée, en limitant à 70 ou 50 la vitesse pour quelques rares alignements remarquables et en passant de 90 km/h à 80 km/h la vitesse limite sur les voies bidirectionnelles (en conservant ou non à 90, dans une première phase, les 60 000 km RGC).
-- fossé : en traitant les fossés trop profonds : les "décreuser", leur donner une forme moins pentée ou les couvrir ou les supprimer. Et en "désélargissant" les voies élargies à tort afin d'avoir un accotement assez large (une bande dérasée d’au moins 1,50m).
-- vitesse : en abaissant de 10 km/h les limitations de vitesse : 100 au lieu de 110 sur voie express 2x2 voies car les "échangeurs" sont souvent succincts et permettent les entrées à contresens, 80 au lieu de 90 sur les routes bidirectionnelles, (en conservant ou non à 90, dans une première phase, les 60 000 km RGC). .
-- piétons : en réalisant une ligne d'arrêt large 5 mètres avant le passage piéton comme dans la majorité des autres pays et en faisant des campagnes (affichage et télévision) pour faire connaitre le comportement requis vis-à-vis des piétons.
-- masques à la visibilité en ville : en libérant la première largeur de 1,50 de trottoir des bacs à fleurs, des parterres et des barrières aux endroits des passages piétons ET en sections hors passages piétons .
- contresens sur autoroute et voies express : en signalant plus fortement le danger à l'intrusion par bretelle de sortie (trou de souris) et en repensant les bretelles d'entrée (double sens et signalisation directionnelle) (voir dossier dans menu du site).
- passages à niveau : en arrêtant de faire clignoter le feu rouge et en aménageant mieux (voir dossier dans menu du site).
2 Nouveaux points noirs, de nouveaux dangers d'infrastructure. On peut éviter une perte de 1000 morts si l'on ne crée pas de nouveaux points noirs, de nouveaux dangers d'infrastructure, sinon cela peut faire remonter la courbe ou tout au moins de ne pas espérer de tendre vers l'asymptote Zéro, mais 1000 :
-- carrefour meurtriers à tourne à gauche central
-- fossés profonds et abrupts
-- élargissements inconsidérés, au détriment de l'accotement
-- plantation de nouveaux arbres
-- dénivellations entre tapis et l'accotement
-- nouveaux bacs à fleurs, nouveaux parterre, nouvelles barrières masquant la première largeur de 1,50 de trottoir aux endroits des passages piétons ET en sections hors passages piétons.
3 à Nouveaux dangers liés au comportement et au véhicule. De même, on peut éviter une perte de 1000 morts si l'on ne crée pas de nouveaux dangers liés au comportement et au véhicule, sinon cela peut aussi faire remonter la courbe ou tout au moins de ne pas espérer de tendre vers l'asymptote Zéro, mais 1000, ou 2000 si cette hausse se conjugue avec les 1000 ci-dessus concernant l'infrastructure, voire jusqu'à 6000 si les trois se cumulent :
-- lunettes à large branches empêchant la vision latérale : les conducteurs ne voient pas bien les piétons ni les autres véhicules ; et les piétons ne voient pas bien les véhicules arriver latéralement.
-- objets suspendus devant le pare-brise cachant la visibilité
-- montant de pare-brise trop large, cachant la visibilité
-- les distracteurs : le téléphone tenu (main libre ou pas), la lecture et l'écriture (!) de SMS, la consultation visuelle de l'écran du GPS, le réglage de la destination sur le GPS et de l'échelle de l'écran, la consultation de ses messages courriel sur les nouveaux petits écrans de poche, le visionnage de DVD et les manipulations pour leur mise en fonction.
-- le manque d'ergonomie et de standardisation des commandes des limiteurs et des régulateurs de vitesse. La difficulté à lire les petits chiffres de fixation des niveaux de vitesse des limiteurs, obligeant à quitter la route des yeux pendant plusieurs secondes.
L'asymptote vers laquelle va tendre la courbe des tués sera donc, selon l'attitude que les autorités vont adopter, comprise entre Zéro et 6000
Va-t-on rester à 3 500, va-t-on remonter à 6 000, ou va-t-on opérer une nouvelle diminution à 3000 ou 2000, ou 1000 ?
On objectera qu'aucune statistique ou rapport ne conforte mes observations et qu'il n'est pas répertorié que des accidents aient eu lieu pour causes les lunettes à larges branches, les limiteurs difficiles à régler, les montants des parebrises trop épais, des objets suspendus, les masques à la visibilité, etc. C'est normal : de telles constatations ne sont pas relevées dans les fiches BAAC.
Triste pays où l'on ne peut pas concevoir qu'on puisse observer et réfléchir sans être épaulé par des chiffres.
Texte et Photos :
Jacques ROBIN
jacques-marie-robin@wanadoo.fr